Petit billet physiologie ici, ça faisait longtemps! On va parler du monoxyde d’azote ou oxyde nitrique. Qu’est-ce que c’est que cette molécule?  C’est une petite molécule gazeuse que notre nez synthétise (entre autres!). De part sa localisation, vous vous doutez bien qu’elle doit avoir une influence sur la respiration et la physiologie respiratoire! Nous allons donc discuter ici de son rôle et de son importance et essayer de comprendre l’impact que cette molécule a sur notre façon de respirer!

 

 

Le monoxyde d’azote (NO)

Le monoxyde d’azote (NO) est une petite molécule gazeuse jouant énormément de rôles physiologiques dans tous les règnes du vivant. Le NO comme son nom l’indique est composé d’un atome d’oxygène et d’un atome d’azote. Ceci en fait une molécule très réactive, c’est à dire qu’elle va interagir facilement avec les autres molécules qu’elle rencontre. On la considère à cause de cela comme toxique puisqu’en grande quantité, elle va détruire les molécules avec lesquelles elle interagit.

Néanmoins, à faible concentration, c’est aussi une molécule qui peut avoir un rôle de signalisation, de défense ou de régulation. Par exemple, le NO est produit par les macrophages dans le cocktail de lyse de pathogènes phagocytés. C’est un des facteurs principaux de l’apoptose programmée chez les plantes. Il est aussi responsable chez certains  animaux comme le calamar d’hawaii de l’activation de la bioluminescence.

En 1998, cette molécule a même fait l’objet d’un Nobel, récompensant la découverte de ses propriétés vasodilatatrices. Cette propriété est très importante puisqu’elle a ouvert le marché au viagra, et ça économiquement, ce n’est pas rien… Comment ça marche? En fait, le NO provoque une vasodilatation des vaisseaux sanguins par relâchement de l’endothélium et des muscles lisses permettant un afflux de sang dans la zone ciblée. De plus, le NO régule également le système parasympathique, notamment au niveau de l’intestin. Enfin, il a un rôle dans notre système immunitaire via les macrophages comme vu précédemment mais comme cytotoxique à part entière.

Le monoxyde d’azote est synthétisé directement dans le nez en grande quantité

Finalement, ce n’est qu’assez récemment que la présence de monoxyde d’azote dans le nez a été détecté. En 1991, une équipe a en effet montré que chez des sujets sains, du NO est expiré lors de l’expiration. Plus tard, son origine a été déterminée. Non pas dans les poumons (en tous cas pas seulement) comme les autres gazs mais dans les sinus où l’épithélium exprime une enzyme, la NO-synthase. Plus spécifiquement, dans les sinus para-nasaux, des cavités présentes autour du nez, assez fragiles. Leur rôle physiologique a d’ailleurs pendant longtemps était peu compris…

Figure 3

https://thorax.bmj.com/content/54/10/947

 

En effet, comme toute cavité, les sinus para-nasaux sont sujets aux infections. Ils sont très peu séparés du nez qui est un nid à virus et bactéries. Jusqu’à 16 % de la population est sujette au sinusite d’ailleurs. Pourtant, on peut poser faire cette remarque dans l’autre sens, pourquoi malgré de telles structures, si peu de personnes en développe finalement? Parce que les sinus synthétisent une grande quantité de NO et ce NO est cytotoxique à haute quantité!

Par conséquent, les gens sujets aux sinusites ont peut-être un défaut dans cette synthèse. A cause de leur manière de respirer peut-être? Dans cet article , par exemple, il a été montré une corrélation entre niveau d’inflammation et susceptibilité à développer des sinusites. Plus l’inflammation est importante, plus le risque de développer ces sinusites est élevé. En allant un peu plus loin, ils se sont rendus comptes que l’activité chez ces malades de la NO-synthase était largement plus faible. L’inflammation pourrait donc réguler négativement la synthèse de NO. Or, on sait que l’inflammation est liée à une activité trop faible du parasympathique qui peut être causé par une mauvaise façon de respirer!

Le monoxyde d’azote joue un rôle dans la régulation de la respiration

Cependant, le rôle antimicrobien du NO dans les sinus paranasaux n’est pas le seul rôle. Vous vous en doutez, la présence du monoxyde d’azote dans le nez va avoir une influence sur notre manière de respirer. En effet, le NO est un vasodilatateur. Or, lors de l’inspiration, le NO est aéroporté dans les poumons jouant un rôle de signal au même titre qu’une hormone. Certains parlent de molécule aérocrine. La comparaison reste hasardeuse puisque les hormones sont tout de même beaucoup plus stables dans le temps qu le NO. Cependant, l’esprit est le même.

En fait, de nombreuses études ont montré que l’apport de NO dans les poumons de façon artificielle ou chez des malades ne synthétisant pas eux-même la molécule améliore grandement l’oxygénation artérielle. Même plus, chez des enfants souffrant d’hyperpression pulmonaire, l’administration de NO a permis de réguler cette pression. Chez des patients intubés, l’assimilation d’oxygène se fait moins bien mais une pompe tirant de l’air des sinus para-nasaux augmente cette assimilation de 10 à 20%!  La concentration de NO va donc grandement influencer l’efficacité respiratoire. Son mode d’action étant de dilater les vaisseaux sanguins et augmenter le volume des alvéoles pulmonaires.

D’ailleurs, les effets du monoxyde d’azote sont connus depuis longtemps. Par exemple, à une époque, en cas de douleur cardiaque, on utilisait de la nitroglycérine qui mis sous la langue dégageait du NO et vasodilatatait le système. Cela se faisait rapidement puisque le NO passe facilement dans les muqueuses. Les chinois ont également décrit ce traitement il y a déjà plus de 1000 ans!

Augmenter la quantité de monoxyde d’azote dans les sinus

Une étude très intéressante publiée en 2002 a montré qu’il est possible de volontairement augmenter la quantité de NO dans les sinus (et par extension dans les poumons). Très utile pour se débarrasser de sinusites par exemple. Pour ceux qui pratiquent les méditations OHM, c’est très facile à faire. Inspirez par le nez, gardez la bouche fermée. Quand vous expirez, faîtes le son ohmmmmmm sur toute l’expiration et bouche fermée. En faisant cela, vous allez accumuler du NO dans les sinus en faisant vibrer les sinus para-nasaux. En effet, la vibration de ce son fait bouger le flux d’air et permet de sortir volontairement l’air chargé en  NO des sinus para-nasaux pour le répartir ensuite dans le nez, puis sur l’expiration suivante, dans les poumons.

L’intérêt est multiple. plus vous le ferez, mieux vous vous oxygènerez puisque les capillaires seront bien plus perméables à l’oxygène. Ensuite, si vous êtes malades des voies aériennes, ou que la maladie arrive, tout nettoyer au NO peut être un bon moyen de contenir l’infection!

La manoeuvre de Valsalva

Une deuxième technique permettant d’augmenter la quantité de NO avant une inspiration est la manoeuvre de Valsalva. Vous savez, c’est cette technique qui permet de rééquilibrer la pression dans les oreilles en avion ou lorsque vous plongez. Lorsque vous tenez cette manoeuvre une vingtaine de seconde, la quantité de NO augmente dans votre nez et donc sur l’inspiration suivante, vous augmenterez sa concentration dans les poumons. 

Comment faire? Pincez-vous le nez, venez expirer l’air de vos poumons vers votre tête. Vous devriez sentir la pression augmenter dans vos oreilles. Tenez la technique une vingtaine de seconde puis réinspirez avec le nez.

Là encore, rhume, trachéite… C’est tout indiqué. Si vous faîtes de l’apnée et que vous voulez tenir plus longtemps, là aussi, lors de la phase d’hyperventilation, vous faciliterez les échanges gazeux en ayant pratiqué cette manoeuvre.

Motifs respiratoires et effets du monoxyde d’azote

Outre ces techniques spécifiques, dans les pratiques respiratoires, nous varions nos motifs de respiration. Ceci va donc avoir un effet sur le NO assimilé lors de l’inspiration. L’exemple le plus parlant est celui des pranayamas, en particulier ceux consistant à se boucher une narine puis l’autre. Ces exercices sont assez difficiles à cause de la longue durée des cycles respiratoires.

Néanmoins, si vous réussissez à limiter la force d’inspiration par le nez et que vous réussissez à solliciter les sinus para-nasaux, vous remarquerez immédiatement que l’exercice devient plus facile. Pourquoi? Parce que sur ce type d’exercices, optimiser les échanges gazeux malgré un flux d’air réduit est crucial. Par conséquent, permettre d’augmenter la perméabilité des alvéoles en vasodilatant grâce au NO optimisera ces échanges. 

Ce type d’exercice permet donc d’améliorer l’assimilation de l’oxygène dans les poumons tout en permettant une accumulation de CO2 grâce à la faible ventilation de l’air.

Plus simple, la simple rétention poumons vides aura tendance à favoriser l’accumulation de NO dans le nez. Ce NO se retrouve ensuite dans les poumons sur l’inspiration suivante.

Conclusion

Quand on parle respiration, on pense facilement à l’oxygène, souvent au dioxyde de carbone mais finalement assez peu au monoxyde d’azote. Pourtant, cette molécule a d’importants effets physiologiques et affecte notre manière de respirer. L’action du NO se fait de deux façons: la première en participant à la protection de l’appareil respiratoire. La seconde en régulant le flux d’air et les échanges gazeux au niveau pulmonaire.

Il y a encore de la recherche sur les effets spécifiques du NO aujourd’hui. Il faut garder en tête qu’il n’a pas toujours un effet positif, sa nature étant d’être cytotoxique. Néanmoins, comme souvent avec la respiration, tant que ce n’est pas chronique, il semble que cela fasse du bien. 

Par conséquent, favoriser l’accumulation de NO lors d’exercices respiratoire semble être bon pour la santé. Ne serait-ce qu’en synthétisant un antibiotique naturel! Alors profitez-en!

A bientôt

Yvan