La pratique de techniques respiratoires est à la mode . Leur popularité vient du fait que ce soit simple à mettre en oeuvre, peu coûteux en temps, énergie ou argent et que les effets se font sentir très vite. Pourtant cette pratique n’est pas sans danger. Néanmoins, lorsque l’on travaille la respiration, on sollicite notre bio-mécanique, notre physiologie et notre mental. Or, comme pour toute sollicitation d’un mécanisme, il peut y avoir des pannes ou de la casse. Pour écrire cet article, je me suis intéressé aux dégâts décrits causés par la pratique de la respiration. Non pas pour faire peur, mais pour faire prendre conscience que ce type de pratique est un véritable exercice qu’il faut faire avec attention, mesure et progressivité. Comme toute pratique sérieuse en fait…
Quel type de changement la respiration peut entraîner?
Ceux qui lisent ce blog régulièrement connaissent bien les différents effets de la respiration. On peut modifier notre structure corporelle en jouant sur l’équilibre des chaîne musculaires. On peut faire varier notre physiologie. Par exemple en jouant sur la tension artérielle, le rythme cardiaque, la production d’hormones et le système immunitaire. Au niveau mental, la respiration aide à faire le silence, prendre une meilleure conscience du corps, changer notre état de motivation.
En listant cela, je parle évidemment d’effets positifs. Toutefois, une mauvaise pratique pourrait avoir exactement les mêmes influences mais du mauvais côté… Exemple: déséquilibrer la posture du corps en mettant trop de tension dans la poitrine ou dans la mâchoire. Ceci entraîne par exemple une suroxygénation liée à une respiration qui devient superficielle. On peut mettre le cerveau en asphyxie et lui faire déclencher trop d’hormones de stress. On peut ainsi épuiser l’organisme. Au niveau mental, on peut trop exciter la psyché nous rendant instable ou à l’inverse trop l’endormir et devenir mou.
Tous ces exemples sont connus dans les pratiques traditionnelles. Mais que dit la science?
Une revue de littérature sur les effets néfastes de la respiration en Yoga
Tout d’abord, nous allons nous intéresser au yoga. Pas que le yoga soit pire qu’autre chose, au contraire. Vu l’âge de la discipline, c’est certainement une des plus sérieuses. Par contre, sa popularité gigantesque a entraîné une augmentation gigantesque du besoin en formateurs dont le niveau à forcément diminuer avec la popularisation. On ne passe pas d’une formation de dix ans à dix jours sans conséquences… Ainsi, des accidents ont régulièrement lieu avec le Yoga et ceci à pu être étudié. C’est ce qu’ont réalisé Kramer, Krucoff et Dobos dans la revue Plos One.
Dans cette revue, les auteurs ont identifié 76 cas décrits d’accident liés à la pratique du yoga répartis un peu partout dans le monde. Parmi les accidents, c’est le pranayama, la pratique respiratoire qui en a causé le plus. Intéressant également, plus de la moitié des cas concerne des instructeurs de Yoga qui se sont blessés lors de pratiques avancées. Dans les blessures décrites, la pratique de respiration tête en bas, jambes en l’air a causé pas mal de problème, en particulier le développement de glaucome lié à la pression sanguine qui devient trop forte dans la tête.
La kapalabathi a été responsable de pneumothorax (pratiqué trop fort sur quelqu’un de pas entraîné) et des cas d’hémorragie rectale et de pneumomedistinum (air qui passe dans la paroi des poumons) liés à trop de pression pour le contrôle respiratoire.
Attention, il ne faut pas non plus faire une psychose, c’est peu sur le nombre de pratiquants. Toutefois, il est bon de connaître le type de dangers auxquels on s’expose. Dans ce cas, il semble que ce soit surtout lié à une mauvaise gestion de la pression créée par la respiration lors d’exercices.
Les dangers liés à l’hyperventilation
L’hyperventilation est une autre pratique commune dans les techniques respiratoires. Elle présente des dangers qui lui sont bien spécifiques. D’abord, des dangers liés à la pratique elle-même. Souvent, les gens perdent connaissance lors de ce type d’exercices en voulant le pousser trop loin. Si en soi ce n’est pas un drame, cela peut le devenir en cas de pratique dans un environnement non approprié. Par exemple, si vous hyperventilez dans une baignoire,vous pouvez bêtement vous noyer. Il semble par exemple que ce soit arrivé à un pratiquant de la méthode Wim Hof il y a deux ou trois ans qui aurait été retrouvé mort dans sa baignoire noyé. On rapporte aussi des cas de pertes de mémoire et de troubles de l’humeur lié à l’hyperventilation. Juste une phot qui m’a fait halluciner, la vitesse de disparition de l’oxygène dans le cerveau après seulement une minute d’hyperventilation:
L’autre danger réside en la puissance de l’effet. Ces hyperventilations vous mettent en gros état de stress. Le corps va donc libérer des endorphines et vous proposer un shoot « naturel ». Malheureusement, tout naturel que ce soit, cela a les mêmes effets que n’importe quelle drogue: il en faut toujours plus pour sentir le même effet. Et il y a une phase de down difficile à gérer surtout si on est pas stable de base. L’addiction à l’hyperventilation devrait donc être un signal d’alarme… Ces hyperventilations ne sont pas l’apanage de Wim Hof, de nombreuses techniques reposent dessus. Souvent, elles paraissent accessibles alors qu’en fait, ce sont les plus difficiles puisqu’il faut être capable de gérer la psyché derrière…
Le risque psychique et la dérive sectaire
Il faut bien être conscient que le travail respiratoire entraîne des états de conscience modifiés. Poussés loin et sans travail préalable sur la stabilité émotionnelle et corporelle, certaines expériences sont très perturbantes. C’est la raison pour laquelle je ne propose qu’une pratique légère pour toucher du doigt et progresser tranquillement. Jamais de « révélations » trop violentes. Je crois fermement qu’un travail corporel et une psyché stable sont indispensable pour pousser le travail respiratoire. De plus, cela permet de réellement connaître ses réactions corporelles et ne pas se laisser noyer dans un verre d’eau dès qu’une sensation apparaît. Mais cela prend du temps.
Bref, si ce travail n’est pas fait, le pratiquant est dans un état de conscience qui permet de le manipuler facilement. Ainsi, la pratique de la respiration holotropique est dans la liste des sectes à surveiller dans un rapport de l’assemblée nationale (ce qui ne remet pas en cause son intérêt intrinsèque). Les pratiques hyperventilatoires sont d’ailleurs les plus dangereuses à ce niveau et la gouroufication la plus simple. Effets bluffants, états modifiés de conscience, s’adressant à des personnes stressées… Le cocktail est propice aux dérives de personnes ayant un besoin de domination.
Enfin, le travail seul peut également être dangereux sans les bons protocoles. Poussés loin, certains exercices font remonter des émotions de façon violente. Il faut pouvoir le canaliser pour bien le vivre. Les délires d’acceptation sans retenu ont peut-être un fond de vrai, mais c’est très difficile à faire sans conséquences. Là encore attention. J’ai une anecdote où dans un cours de systema, l’art martial russe de la respiration, à Moscou, chez le fondateur, une personne a fait une crise lors d’un exercice qu’il a trop poussé qui ressemblait à une possession. Les russes sur place se sont signés et ont pris peur tellement les réactions étaient impressionnantes… Il a fallu l’intervention de Mikhail Ryabko pour stopper la crise.
Conclusion
Cet article était juste un petit rappel concernant une pratique qui malgré son aspect inoffensif n’est pas dénuée de risque. Alors bien-sûr, on fait pas du parachute, mais tout de même, il peut y avoir des conséquences en cas de mauvaise pratique. Comme tout, cela demande de la pratique et un bon encadrement par des gens stables est également nécessaire. Enfin, n’oubliez jamais qu’il faut un corps capable de recevoir du changement. Un corps faible ne permettra pas des changements mentaux importants et de façon rapide sans dégâts.
Pour finir, n’arrêtez pas de pratiquer, prenez votre temps, souffle après souffle. Cela vous permettra de rester à l’écoute et d’éviter les soucis 🙂
A bientôt
Yvan
Bonjour, pour le coup une question concernant l’hyperventilation.
Je pratique le pranayama et en ce moment la méthode Wim hof aussi depuis plusieurs mois.
Apparemment dans certains de vos commentaires pour parler d’une ‘perte’ n’énergie, ce que personnellement je ne ressens pas peut-être avec la pratique du yoga tout simplement.
Mais comment rééquilibrer ça si cela arrive par exemple ? en faisant l’exercice 1jour sur 2 ?
Par contre l’addiction j’avoue que oui parfois j’ai besoin de ma ‘dose’, sans pour autant aller plus loin ou le faire plusieurs fois par jour. Voir même quand j’y repense, si je fais 10-15 respirations (a la Wim hof) je suis déjà dans le même état que 30 quand je faisais à mes débuts. Pour les rétentions en apnée j’attends rarement les 2 minutes, ça tourne souvent à 1 voir 1.30 et je n’en ressens pas le besoin d’aller plus loin non plus. Les effets sont tout aussi bons pour moi.
Bonjour merci pour cet article j’ai commencé le yoga sans pour autant faire attention à la respiration mais je me suis rendu compte que je respirait beaucoup mieux après bref j’ai commencé à prendre des court en ligne et la le prof insistait sur la respiration pendant les postures et la j’ai commencé à me sentir plus mal que bien après les séances je me sentai plus stressé et tendu et je ne ressentais plus du tout les bienfait ressenti quand je n’y fesait pas plus attention. Je n’ai quasi rien trouvé sur le net sur ça mais ce qui est sûr c’est que je vais continuer à pratiquer comme je le fesait avant dixit les prof de yoga…
Oui , respirer sans contrainte c’est très différent de respirer sous contrainte physique. Il faut avoir une bonne respiration pour pouvoir le faire.