J’ai déjà abordé dans deux articles le lâcher-prise. Dans ces deux articles, j’ai proposé une approche technique pour tester ou goûter le lâcher-prise. Néanmoins, j’avais précisé à l’époque que cela ne suffisait pas. C’est donc dans le cadre de ma série sur les émotions que je vais revenir sur cette notion de lâcher-prise. Dans cet article, je vais mieux définir ce que j’entends par ce terme et les conséquences de cette définition sur la pratique. En effet, la logique de travail du lâcher-prise sera beaucoup plus  claire si on en comprend la nature. Retour donc sur le lâcher-prise!

Lâcher-prise et bien-être

 

La lâcher-prise aujourd’hui est une sorte de mantra du développement personnel et une condition sine qua none du bien-être. On cherche à atteindre le lâcher-prise. Pour cela on va se mettre généralement dans un état de grande détente, quelle que soit la technique, pour réaliser cette état. Si vous avez déjà pratiqué une discipline quelconque de bien-être vous devez connaître cet état. Vous avez l’impression d’être un moine zen et que rien ne peut vous atteindre. Mais qu’arrive-t-il quand vous rentrez de votre cours et que quelqu’un vous fait une queue de poisson?

En fait, ces pratiques peuvent vous amener dans un état, physiologique et mental qui va transitoirement vous faire beaucoup de bien. La technique qui illustre cela parfaitement est la cohérence cardiaque. Cette technique doit être répétée trois fois par jour pour être sûr de conserver cet état si particulier qui se rapproche (en mieux) de l’état de bien-être.

Alors quid du lâcher-prise?

 

Le lâcher-prise est une qualité, pas un état

 

Là est l’astuce ou le problème en fonction de comment on le prend. On ne peut pas se mettre en état de lâcher-prise. En fait, on mime ce que cette qualité devrait être, mais c’est tout. Le lâcher-prise est une qualité. En tant que qualité, elle transparaît tout le temps quand elle est là. Quelles sont les caractéristiques de cet état? Il y en a plusieurs et le bien-être peut en être une conséquence mais pas forcément.

Le lâcher-prise est la capacité à accepter de ne pas lutter contre des forces que l’on ne peut pas contrôler. Ceci implique que l’on est dans l’action et que quelque chose nous empêche d’avancer. Quand on a identifié que cette chose n’est pas gérable, on se contente de trouver un autre moyen de continuer à avancer. On comprend alors pourquoi ce n’est pas forcément agréable et que bien-être et lâcher-prise ne vont pas nécessairement de paire.

Le lâcher-prise régule les émotions, c’est pourquoi j’en parle dans cette série. Lorsque cette qualité est atteinte, vous ressentez évidemment les mêmes émotions que tout le monde mais elles deviennent un simple signal qui ne s’enregistrera pas dans le corps.

Le lâcher-prise favorise l’adaptation et la prise d’initiative. Les gens qui ont cette qualité vont paradoxalement être pro-actifs dans leur vie et non pas mous et en attente. Pourquoi? Parce que la capacité à ne pas être entraîné développe une sorte de confiance en soi ou en sa bonne étoile qui nous rend sûrs que quoi qu’on fasse, il y aura toujours une solution. Au pire, on meurt donc ça va.

 

Où trouve-t-on des gens qui ont développé cette qualité?

 

De mon expérience, les personnes que j’ai pu rencontrer et qui avaient cette qualité n’étaient pas là où on pouvait croire. Je l’ai trouvé chez des militaires des forces spéciales dont la reconversion après l’armée a montré qu’ils avaient vraiment intégré cette qualité.

Je l’ai vu chez des entrepreneurs très qui arrivaient à se dépêtrer des pires situations sans aucune panique et qui de fait avaient un très grand succès dans leur domaine.

Enfin, je l’ai vu chez une poignée de pratiquants de diverses spiritualités. Ces pratiquants ont une pratique active et difficile. Ils avaient cette caractéristique de la vivre avec une grande certitude sans jamais venir chercher à convaincre les autres du bienfait de leur démarche.

Il est évident qu’il existe des gens qui ont développé cette qualité ailleurs. Néanmoins, pour les reconnaître, je dirais que ce sont des gens qui ont confiance, qui sont capables d’atteindre les objectifs qu’ils se fixent et qui sont toujours capables de se relever de ce que d’autres qualifieraient d’un échec.

 

Comment développer cette qualité?

 

Il va y avoir deux axes de travail principaux et un contexte également. Le contexte doit être difficile. Il est à mon sens impossible de travailler le lâcher-prise avec des exercices agréables puisqu’il se révèle dans la difficulté. Ensuite, il va falloir travailler à la fois sur le mental et sur le corps. En effet, l’un crispe ou au contraire ramolli l’autre.

Le travail sur le mental sera tourné autour de l’ego, de l’image qu’on s’est construit. En effet, on se construit autour de certitudes et ces certitudes nous empêche de lâcher au bon moment. A la place, elles vont nous faire résister ou au contraire abandonner à contre-temps lorsque le courant est contraire.

Cette attitude pourra se répercuter dans le corps qui aura énormément de tensions en particulier au niveau des jambes et du dos pour se protéger et éviter la chute quand on est dans la résistance. A l’inverse, quand on est dans l’abandon, le corps va être flasque, sans structure. Mais ces caractéristiques corporelles peuvent aussi se transmettre au mental! Soulever du poids en excès, musclez vous trop, il est probable que vos certitudes deviennent de plus ne plus ancrée. A l’inverse, si vous êtes mous, que vous n’avez aucune activité, la moindre difficulté vous fera abandonner, ce qui est l’inverse du lâcher-prise.

 

Deux exercices à travailler

 

Commençons par un exercice mental. Mettez en place une respiration de travail et pensez à une valeur que vous avez et qui vous définit selon vous. Pensez à une situation où quelqu’un ou quelque chose est allé contre cette valeur. Demandez-vous comment vous avez réagi et si y repenser perturbe votre respiration. Imaginez ce qu’il se passerait si vous renonciez à cette valeur. Toute modification de votre état et/ou de votre respiration doit vous amener à déclencher une respiration rythmique. Une fois le calme revenu, recommencé jusqu’à ce que cela ne vous fasse plus réagir. Changer alors de valeur ou de situation.

Passons ensuite à un exercice physique.  Nous avons vu dans un article précédent le fait de simplement se laisser tomber tranquillement sur un lit. Essayons un exercice un peu plus compliqué. Pour cela vous avez besoin de quelques mètres carrés. Attention à éviter les angles ou les objets pointus. Fermez les yeux, laissez vous tomber sur une expiration puis relevez vous sur l’inspiration suivante. Recommencez ceci sans vous arrêter pendant au moins dix minutes. C’est un exercice compliqué. Observez ce qui se passe en vous, les doutes, les peurs, l’ennui qui peuvent survenir. Laissez tout cela couler sur vous et contentez vous d’être attentif aux montées et descentes. Si vous percutez quelque chose, détendez-vous pour que ça ne soit pas douloureux et que votre corps s’adapte pour absorber le choc.

 

Avec ces deux exercices vous avez un travail intéressant pour petit à petit, développer la qualité de lâcher-prise.

 

Conclusion

 

Loin d’être un état transitoire, le lâcher-prise est une vraie qualité à développer. Il est facile de voir si cette qualité est présente chez quelqu’un en regardant sa vie. Attention à ne pas confondre cela avec de la mollesse ou de la passivité. De même, quelqu’un qui est très actif, se bat peut en fait avoir cette qualité. En effet, le lâcher-prise encore une fois c’est ne pas lutter quand les choses nous dépassent.

Le lâcher-prise permettra ensuite de développer des qualités comme l’adaptation et le timing. Mais c’est un autre sujet. Cette parenthèse dans le dossier gestion des émotions est donc terminée. J’espère que cela vous donne une meilleure vision de ce qu’est le lâcher-prise et de l’intérêt de le développer.  Nous en parlerons lors du prochain stage sur les émotions. En effet, cette qualité vous permettra d’être plus en accord avec vos émotions à terme…

A bientôt

 

Yvan